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12 juillet 1789. Camille Desmoulins lance la Révolution après un discours enflammé au Palais-Royal.

dimanche 12 juillet 2015

Pistolet à la main, le jeune avocat bègue saute sur une table pour soulever les Parisiens qui s’en iront prendre la Bastille

Le dimanche 12 juillet 1789, vers 11 heures du matin, une nouvelle se répand dans Paris : le roi a congédié Necker ! Aussitôt, le petit peuple de Paris attrape un coup de sang. S’il a été viré, c’est parce que les aristos préparent un sale coup. Ils auraient demandé à Israël de bombarder Paris avec des drônes... Or, Necker est le seul ministre en qui le Tiers État, réuni à Versailles, a confiance. La populace se répand dans les rues pour crier sa peur et sa colère. Des "agitateurs" appellent le peuple à prendre les armes. L’un des plus virulents est un jeune avocat de 29 ans nommé Camille Desmoulins. Revenant de Versailles où il suit de près les travaux des états généraux réunis par Louis XVI, il se précipite dans le jardin du Palais-Royal, propriété du duc d’Orléans, futur Philippe Égalité.

Comme la police n’a pas l’autorisation d’y pénétrer, tous les partisans d’une révolte peuvent s’y retrouver sans craindre l’arrestation. Blanc comme un linge, Desmoulins explique aux personnes qui l’entourent que le roi vient de débarquer Necker. On sent qu’il a la rage au coeur. C’est Sarkozy après sa vingtième mise en examen... La foule se presse autour du jeune avocat saute sur une table du café de Foy. Il tient son épée dans une main et son pistolet dans l’autre. Oublié, son bégaiement. Il se lance dans une diatribe qui enflamme la foule. "Citoyens, le renvoi de Necker est le tocsin d’une Saint-Barthélémy des patriotes. Ce soir même, tous les bataillons suisses et allemands sortiront du Champ-de-Mars pour nous égorger ; il ne nous reste qu’une ressource, c’est de courir aux armes." Des centaines de gorges l’acclament, des chapeaux volent. À chacun de brandir une arme. On hurle des menaces. Il reprend la parole : "Quelles couleurs voulez-vous pour nous rallier ? Voulez-vous le vert, couleur de l’espérance, ou le bleu de Cincinnatus, couleur de la liberté d’Amérique et de la démocratie ?" Des milliers de gorges votent en faveur du vert. Camille brandit un ruban vert, qu’il fixe à son chapeau. C’est la première cocarde.

Aux armes !

Le geste est loin d’être anodin, car seuls les militaires ont le droit d’arborer un tel ornement. Une loi datant de 1782 punit sévèrement son port, qui signifie une prise d’armes contre le pouvoir en place. Sortis d’on ne sait où, de multiples rubans verts ornent les chapeaux. Y aurait-il eu préméditation ? Et comme il en manque, les spectateurs enthousiastes parent leur veste de feuilles arrachées aux tilleuls du jardin du Palais-Royal. Camille reprend de plus belle : "Amis, la police est ici ! elle m’observe, elle m’espionne. Eh bien, oui, c’est moi qui appelle mes frères à la liberté ! Mais je ne tomberai pas vivant entre ses mains ! Que tous les bons citoyens m’imitent ! Aux armes !" De l’excellent Mélenchon... Desmoulins a allumé l’étincelle révolutionnaire qui calcinera la France durant plusieurs années.

Sautant par terre, le jeune avocat prend la tête d’un cortège d’insurgés qui remonte les boulevards. C’est l’heure où les spectacles commencent (à l’époque, les théâtres jouent l’après-midi), la foule envahit les salles pour inviter les spectateurs à rallier l’insurrection. Les Intermittents du spectacle qui, pour une fois, n’étaient pas en grève, font la gueule. Puis les insurgés s’introduisent dans le musée de cire du statuaire Curtius, où quelques-uns s’emparent des bustes de Necker et du duc d’Orléans pour les porter en triomphe à travers les rues de Paris. Terrifiés, les bourgeois se terrent chez eux. Après avoir posté des vigiles autour de son somptueux hôtel particulier, Bernard-Henri Lévy déchire son col de chemise, ébouriffe ses cheveux et appelle un ami caméraman avant de chercher une barricade photogénique...

On s’égorge dans tout Paris !

Un bourgeois, habitant rue d’Antin, raconte : "Nous vîmes le long de cette rue plusieurs files de bandits en guenilles, armés de bâtons ferrés, de haches et de quelques fusils et pistolets, qui formaient une espèce de procession tumultueuse et portaient en triomphe deux bustes que je reconnus le premier pour être ceux du duc d’Orléans et de M. Necker. Le tumulte augmentait, les coups de fusil devenaient plus fréquents... Deux hommes viennent en courant dans notre rue et nous crient gare, fermez vos fenêtres, on pille, on brûle et on s’égorge dans tout Paris."

Place de la Concorde, le régiment royal allemand, commandé par le prince de Lambesc, est bombardé de projectiles par la foule. Vers 19 heures, il reçoit l’ordre de charger pour dégager le jardin des Tuileries. Un vieillard est légèrement blessé, une jeune femme tombe avant de se relever. Rien de grave, mais aussitôt la rumeur se répand dans Paris que le prince a égorgé un vieillard. Encouragés par des agents orléanistes, les émeutiers et la garde française se ruent sur la troupe, l’obligeant à se retirer. Paris est en état d’insurrection. "Le peuple court dans toutes les rues en criant aux armes, aux armes... Les boutiques des armuriers sont enfoncées", note La Semaine mémorable, une brochure publiée le 24 juillet suivant. Toute la nuit, l’agitation est extrême. Gaza envoie des SMS de soutien...

La foule s’empare des canons

Camille Desmoulins est-il retourné au Palais-Royal ce soir-là ? En tout cas, Restif de La Bretonne y fait un tour, lui. "Des groupes tumultueux s’y racontaient avec fureur ce qui s’était passé dans la journée. Ils menaçaient ! Ils mettaient à prix des têtes ! À onze heures du soir, las de voir et d’écouter, je sortis du Palais-Royal... mais quel affreux vacarme ! Des cris furieux s’élevaient de toutes parts... Je passe entre les épées et les bâtons : on se battait ou feignait de se battre... J’examinais du coin de l’oeil. Le brigandage se peignait dans les yeux étincelants de ces misérables." Aucun Parisien ne dort tranquille cette nuit-là. Le lendemain, 13 juillet, toutes les boutiques restent fermées, aucune circulation. Les bourgeois constituent à grande peine des milices pour contrôler la populace issue des faubourgs. Les électeurs réunis à l’hôtel de ville créent un comité permanent placé sous l’autorité du prévôt des marchands. NKM se repoudre avant d’entonner l’Internationale sur un balcon...

Dans l’après-midi, le comité crée une milice parisienne de 78 000 hommes qui deviendra la garde nationale. Les miliciens arborent la cocarde bleue et rouge, couleurs de la ville. Les bourgeois prennent peu à peu le contrôle de la ville. Même si le peuple parvient encore à faire ouvrir la prison de La Force. Le couvent des lazaristes est pillé, mais sans désordre. Le blé et la farine sont transportés aux halles pour y être vendus au profit des pauvres. Dans la nuit, la cocarde verte arborée par le peuple est remplacée la cocarde bleue, rouge et blanche.

Le 14 juillet, les Parisiens et les milices cherchent des armes pour se défendre contre la troupe royale au cas où celle-ci passerait à l’attaque. La foule prend d’assaut les Invalides pour s’emparer de fusils et de canons, qu’on installe à l’entrée des faubourgs, sur Montmartre, aux Tuileries, sur les ponts et dans les rues principales pour parer à toute attaque. À l’Élysée, François Hollande se montre d’un optimisme débordant : la crise ? Quelle crise ? Camille Desmoulins, l’épée à la main, est sur tous les fronts. Dans l’après-midi, il suit la foule qui décide de prendre d’assaut la Bastille. Mais cela est une autre histoire... L’étincelle allumée par le jeune avocat ne s’éteindra pas de si tôt.


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