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La Chine abaisse encore le cours du yuan

jeudi 13 août 2015

Pour le 3e jour de suite, la Chine a réduit le taux de référence du yuan face au dollar, avec pour objectif de stimuler son commerce extérieur.

La Chine a dévalué jeudi le taux de référence du yuan pour le troisième jour consécutif, mais la banque centrale s’est efforcée de rassurer, affirmant qu’une dépréciation prolongée n’aurait "aucun fondement" et qu’elle se tenait prête à intervenir en cas de "distorsions" excessives. La banque centrale chinoise (PBOC) a réduit d’environ 1 % le taux-pivot autour duquel le renminbi (autre nom du yuan) est autorisé à fluctuer. Celui-ci a été ramené à 6,4010 yuans pour un dollar, contre 6,3306 yuans mercredi. L’institution avait déjà abaissé ce taux de référence de presque 2 % mardi, puis d’environ 1,6 % mercredi : des décisions considérées comme autant de dévaluations successives, même si la banque centrale s’en défend.

La brutale dépréciation du yuan, perçue comme une tentative de Pékin pour revigorer ses exportations et son économie en difficulté, avait fait chuter de concert ces deux derniers jours Bourses mondiales et cours des matières premières. Mais les marchés financiers se sont ressaisis vigoureusement jeudi, rassurés par le nouveau ton des autorités chinoises. De fait, celles-ci apparaissent désormais soucieuses de freiner la dégringolade du renminbi et de désamorcer les critiques les accusant de déclencher une nouvelle "guerre des devises".

"Actuellement, il n’y a aucun fondement à une dépréciation prolongée du taux de change du yuan", a assuré jeudi Zhang Xiaohui, assistant du gouverneur de la PBOC. "La banque centrale a tout à fait la capacité de maintenir le renminbi fondamentalement stable à un niveau raisonnable et équilibré", a-t-il martelé, lors d’une rare conférence de presse de l’institution. Le vice-gouverneur de la PBOC Yi Gang a enfoncé le clou : "L’idée que l’on viserait une dévaluation de 10 % pour stimuler nos exportations est absolument absurde et extravagante !"

"Période de rodage"

Les deux responsables ont rappelé que la banque centrale avait en fait modifié sa façon de calculer le taux-pivot du yuan pour prendre davantage en compte les fluctuations des marchés des changes. Et que les dépréciations drastiques des derniers jours découlaient simplement de ce nouveau mécanisme, en comblant l’écart entre le niveau officiel où se trouvait le yuan et la valeur "réelle" que lui prête le marché. "Cet écart était de l’ordre de 3 %", et étant donné la chute enregistrée par le renminbi depuis mardi, "l’ajustement est désormais pratiquement terminé", a commenté M. Zhang. Le surcroît de flexibilité aurait donné libre cours aux pressions à la baisse sur le yuan, accumulées et contenues depuis des mois, a-t-il suggéré. "Tout le monde était habitué à un taux de change extrêmement stable, alors forcément cette correction a provoqué des fluctuations, mais celles-ci restent gérables, et après une brève et temporaire période de rodage, on retournera à des conditions normales", abondait le vice-gouverneur Yi.

Ces propos semblaient convaincre les investisseurs, et les places boursières ont nettement rebondi jeudi en Asie comme en Europe. D’autant que, d’après l’agence Bloomberg, la banque centrale serait d’ores et déjà intervenue mercredi soir : une remontée soudaine du yuan juste avant la clôture des échanges serait ainsi due à des achats massifs de dollars par la PBOC.

Sans confirmer cette intervention, Yi Gang a souligné jeudi que l’institution continuerait d’exercer "une supervision efficace" en cas de fluctuations trop importantes et de "distorsions". Un signe que Pékin n’est guère désireux de voir le yuan plonger de façon incontrôlée. Une telle dépréciation pourrait en effet être à double tranchant, en encourageant les fuites de capitaux hors de Chine, en renchérissant le coût des importations du pays et en gonflant le poids des dettes en dollars des entreprises chinoises.

"Le pire est passé"

"Il semblerait que le pire soit désormais passé", commentait Patrick Bennett, stratégiste de la Canadian Imperial Bank of Commerce. "L’intervention de la banque centrale a apaisé les angoisses du marché. Cela ne fait plus sens de voir le yuan s’affaiblir indéfiniment", soulignait-il, cité par Bloomberg News.

Jeudi, sur le marché national, la monnaie chinoise a terminé à 6,3982 yuans pour un dollar : certes de nouveau en repli, par rapport à la veille, mais plus forte que le taux-pivot de la PBOC. La Chine continue d’encadrer étroitement la convertibilité du yuan, celui-ci ne pouvant fluctuer que dans une fourchette quotidienne de 2 % de part et d’autre du taux de référence déterminé par la banque centrale. Mais en décidant d’accompagner plus fidèlement les mouvements du marché, Pékin pourrait chercher à conforter les chances du renminbi d’intégrer le club des grandes monnaies mondiales. Et notamment d’être inclus dans les Droits de tirage spéciaux (DTS), l’unité de compte du Fonds monétaire international (FMI).


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