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Syrie : le maintien d’Assad n’est plus tabou

dimanche 27 septembre 2015

Les deux fidèles alliés de Damas, la Russie et l’Iran, apparaissaient dimanche en position de force pour imposer aux Occidentaux leur stratégie visant à faire de la lutte contre les jihadistes en Syrie la priorité absolue, en maintenant en place le président Bachar al-Assad.

A la veille de l’ouverture de l’Assemblée générale des Nations Unies, les présidents russe Vladimir Poutine et iranien Hassan Rohani ont, dans des interviews télévisées, poussé leurs pions pour imposer leur vision de la gestion du conflit syrien face à des Américains et Européens ébranlés par la crise des réfugiés et la menace terroriste.

Vladimir Poutine, qui doit rencontrer lundi à New York en tête-à-tête son homologue américain Barack Obama -une première depuis plus de deux ans-, a ainsi levé le voile sur la nouvelle coalition qu’il entend mettre en place pour lutter contre les jihadistes de l’Etat islamique.

"Nous avons proposé de coopérer avec les pays de la région", a-t-il déclaré sur la chaîne CBS. "Nous essayons d’établir une sorte de cadre de coordination, nous aimerions avoir une plateforme commune pour une action collective contre les terroristes", a-t-il expliqué.

Moscou est à l’offensive depuis plusieurs semaines sur le dossier syrien, en renforçant considérablement sa présence militaire dans le fief du régime dans le nord-ouest de la Syrie et en multipliant les initiatives : dimanche, Bagdad a ainsi annoncé que l’Irak, la Russie, l’Iran et la Syrie avaient décidé de créer un centre de renseignement dans la capitale irakienne, pour lutter plus efficacement contre l’EI.

- Fait accompli -

Ces initiatives russes inquiètent les Etats-Unis et leurs alliés européens, qui semblent de plus en plus mis devant le fait accompli par Moscou, au moment où leur propre stratégie militaire contre l’EI paraît patiner.

"Nous sommes juste en train de commencer à essayer de comprendre quelles sont les intentions de la Russie en Syrie et en Irak, et d’essayer de voir s’il y a des moyens de trouver une issue bénéfique", a reconnu dimanche un haut responsable du département d’Etat américain.

Washington et une soixantaine de pays européens et arabes sunnites pilotent depuis un an une coalition militaire qui frappe des bastions de l’EI en Syrie et en Irak. La France, qui participe aux opérations en Irak, a pour la première fois dimanche effectué des frappes en Syrie contre un camp d’entraînement de l’EI à Deir Ezzor (est), au nom de la "légitime défense". Une annonce solennellement confirmée par François Hollande à New York.

Mais toutes ces opérations militaires n’ont pas empêché l’organisation jihadiste de consolider ses positions, ni n’ont ruiné son pouvoir d’attraction : près de 30.000 jihadistes étrangers se sont rendus en Syrie et en Irak depuis 2011, selon des responsables du renseignement américains cités par le New York Times, le double de la précédente estimation il y a un an.

- Vers le maintien d’Assad -

Devant cette impasse sur le terrain et après plus de quatre ans d’une guerre qui a fait plus de 240.000 morts et des millions de réfugiés, Moscou et Téhéran ont également réaffirmé sans ambages que le régime de leur allié Bachar al Assad était le seul rempart contre le terrorisme.

Exploitant les tergiversations occidentales sur le sort du président syrien —dont le départ immédiat et sans condition fut longtemps réclamé—, le président iranien a affirmé qu’il existait désormais un large consensus international pour son maintien au pouvoir.

"Je pense qu’aujourd’hui tout le monde a accepté que le président Assad devait rester (au pouvoir) afin de combattre les terroristes", a déclaré M. Rohani sur CNN. "En Syrie, notre premier objectif est de combattre les terroristes et de les défaire, et nous n’avons pas d’autre solution que de renforcer l’autorité centrale et le gouvernement comme les principaux centres de pouvoir", a-t-il insisté.

Le message commence à passer, depuis quelques semaines. Washington, Londres, Berlin et même Paris, ne posent plus le départ immédiat de M. Assad comme préalable à toute négociation, la chancelière allemande Angela Merkel étant même allée jusqu’à dire qu’il faudrait aussi discuter avec lui.

Même les Etats-Unis ont assoupli leur position : il y a une semaine, John Kerry concédait que le calendrier de la sortie de M. Assad était négociable.

Quant à Paris et Londres, ils répètent que Bachar ne peut pas faire partie de "l’avenir" de la Syrie, mais restent flous sur le calendrier et les modalités de son départ.


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