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Israël-Gaza : la guerre malgré eux ?

samedi 9 août 2014

Edito du Monde. La guerre échappe souvent à ceux qui s’y risquent. Elle a sa propre dynamique. Elle peut entraîner ses protagonistes bien au-delà de ce qu’ils souhaitaient au départ. C’est ainsi que se nouent les tragédies.

Et cela pourrait bien être le cas dans la bataille qui oppose Israël au mouvement islamiste palestinien Hamas. Depuis le début de la semaine, les deux parties s’affrontent avec une intensité croissante.

Du territoire palestinien de Gaza, fief du Hamas, des dizaines de roquettes sont tirées sur Israël – pas moins de cent pour la journée de mercredi 9 juillet, dont certaines ont approché les villes de Tel-Aviv et Haïfa. L’artillerie de marine et l’aviation israéliennes répliquent en bombardant des cibles « politico-militaires » sur cette étroite langue de terre sablonneuse qu’est Gaza – faisant quelque 60 morts en trois jours.

EMBALLEMENT

Le gouvernement de Benjamin Nétanyahou promet de maintenir son opération tant que des roquettes seront tirées sur Israël ; le Hamas jure qu’il y aura des tirs tant que Gaza est bombardée par Israël… Si l’affaire n’était pas aussi grave, on parlerait de stratégie de cour de récréation.

La vérité est que ni M. Nétanyahou ni les chefs du Hamas ne voulaient cet enchaînement. Ils ont cédé à l’emballement rhétorique qui, de part et d’autre, a suivi l’assassinat de trois jeunes Israéliens, puis celui d’un jeune Palestinien, au mois de juin. Ils y ont été acculés par leur faiblesse politique réciproque.

M. Nétanyahou est sous la pression de ses concurrents de l’ultradroite, membres de sa coalition, qui le défient d’« en finir une fois pour toutes » avec le Hamas. Mais celui-ci, dépassé par des groupes plus radicaux et dont l’arsenal de roquettes est considérable, est plus affaibli que jamais.

AUCUNE STRATÉGIE À LONG TERME

Le Hamas a perdu le soutien de ses parrains, les Frères musulmans égyptiens, chassés du pouvoir au Caire par un maréchal Abdel Fattah Al-Sissi ouvertement hostile aux islamistes. Sunnite, le Hamas défend le camp de la rébellion syrienne, ce qui lui a valu de perdre l’appui de Damas et de Téhéran.

M. Nétanyahou, occupé à survivre politiquement, n’a aucune stratégie à long terme concernant le conflit avec les Palestiniens. Force dominante sans ressources dans le territoire de Gaza, le Hamas et ses chefs n’en ont pas non plus.

Israël prend des mesures pour une opération terrestre. Il est peu probable que M. Nétanyahou soit très favorable à une telle perspective. Pareille opération serait coûteuse, sans résultat garanti, et, en tout état de cause, Gaza sans le Hamas prendrait des allures de Somalie – rien de bien tentant pour Israël. Les chefs du Hamas n’ont pas intérêt non plus à la poursuite des opérations en cours.

Mais les uns et les autres sont aujourd’hui au bord de l’« incident » – un tir qui tue des dizaines de civils – qui les amènera à franchir un cran de plus dans la guerre. C’est tragique – et absurde.


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