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« Il faut que les banques centrales alimentent les entreprises en cash, sans limites » Tribune

samedi 21 mars 2020 par Charles

François Meunier
Ex-cadre dans une institution financière
Le financier François Meunier demande à la BCE, dans une tribune au « Monde », de rompre avec l’orthodoxie monétaire et financière pour permettre aux entreprises de tenir et aux Etats de dépenser autant que nécessaire.

Tribune. Sauver des vies est la priorité. Mais sauver l’économie pour éviter un Lehman Brothers puissance XXL [la banque d’affaires américaine s’est effondrée en 2008], les faillites, le chômage, la montée des nationalismes est tout aussi urgent pour que la crise actuelle n’obère pas l’avenir de tous pendant des décennies, pour éviter la mort économique de dizaines de milliers de PME et la ruine des populations les plus exposées.
Il est urgent que les présidentes de la Banque centrale européenne (BCE), Christine Lagarde, et de la Commission européenne, l’Allemande Ursula von der Leyen, s’engagent sur des mesures extraordinaires, au-delà de celles annoncées et des déclarations de principe.
Pour éviter le pire, partons de ce que l’on sait.
On sait que le circuit BCE-banques-économie réelle ne marche pas depuis dix ans : en témoigne la réaction des marchés aux annonces de la BCE ciblant le crédit aux entreprises (celles du 18 mars aussi visent presque exclusivement ce canal).
On sait que l’annonce de 120 milliards de facilités de crédit additionnelles jusque fin 2020 était dérisoire : les taux italiens et français ont explosé juste après. Le sextuplement, le 18 mars, des montants allouables donne un bol d’air immédiat, mais risque d’être insuffisant pour enrayer la chute et pouvoir soutenir, à terme, un véritable rebond.
Traitement de choc
Le risque d’une flambée des taux, si la récession dure, persiste : le circuit de la politique monétaire est donc grippé, et la dégringolade continue des marchés, tous actifs confondus, le confirme.
On sait, sans le dire, que la croissance est en réalité nulle sans l’artifice des déficits budgétaires : les déficits français de 2 % à 3 %, hors charge de la dette, permettent d’atteindre un maigre + 1 % de croissance. Il en est de même aux Etats-Unis depuis 2017. Et ce soutien budgétaire, qui pèse déjà 8 % du produit intérieur brut (PIB) en France (c’est le montant des émissions annuelles de dette depuis la crise de 2008), dépassera très vite les 10 %.
Au final, donc, on sait que les principes, règles et pratiques actuelles sont inaptes à faire barrière à un violent choc saisonnier, et inaptes à éviter une récession plus durable et profonde : on a donc besoin d’un traitement de choc ! Donc de rompre – urgemment – avec l’orthodoxie monétaire et économique.
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Les mesures susceptibles d’enrayer l’effondrement des économies sont les suivantes :
– Des prêts aux PME à 0 % (trésorerie et investissements) à guichets ouverts, sans limites, directement auprès de la BCE via les banques centrales nationales (BCN), sans passer par les banques privées, ni même publiques (BPI France). C’est une version du « drone monétaire » [version high-tech de la monnaie hélicoptère] ciblant les PME. Une autre solution, qui impliquerait les Etats, serait que la BCE accorde une garantie sans limites aux Etats, et non aux banques, prêtant à 0 % aux PME.

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